CHRONIQUES

Gioconda BELLI

NICARAGUA

Née en 1948 à Managua, Gioconda Belli est poète et romancière. Dans les années 1970, elle s’est engagée contRe la dictature somoziste et après l’arrivée au pouvoir des sandiniste, elle a occupé plusieurs postes officiels. Le Prix de Poésie Jaime Gil de Biedma lui a été accordé en octobre 2020 en Espagne.

La République des femmes

2010 / 2021

En pleine campagne présidentielle au Faguas, petite république centraméricaine, le volcan Mitre se réveille et recouvre le pays d’un noir nuage. Quelques jours plus tard, on doit accepter l’évidence : une substance rejetée par l’éruption, en faisant baisser drastiquement le taux de testostérone, a fait des mâles des moutons, non, des agneaux sans défense. Une aubaine pour le PIE (Parti de la Gauche Érotique, dont les leaders (leadères ? leader.e.s ? comment diable faut-il écrire, il n’y a aucun homme dans ce parti ?) vont profiter… et vont se faire élire. La nouvelle Présidente s’appelle Viviana Sansón, elle met sur pied une politique résolument féministe.

Pour arriver au sommet de l’État, une volonté d’acier et beaucoup de hasard ont été nécessaires, un pingouin, incongru sous les tropiques ayant été l’élément déclencheur. La journaliste, veuve et mère d’une fillette est ainsi poussée vers un engagement partagé par un groupe soudé d’amies. Son pays est malade des inégalités et de la corruption des haut-placés. Il ne s’agira pas pour ces femmes courageuses de se « viriliser » mais d’agir en protectrices du pays pour lui apporter de la sérénité et de l’attention, tout simplement, ce qui risque de déplaire à certaines féministes. Et oui, pour penser à l’ensemble des problèmes sociaux, c’est l’imagination qui doit prendre le pouvoir.

L’effet ressenti à la lecture de La République des femmes ressemble à un parcours de montagnes russes : de haut en bas, de bas en haut, du réel (social et politique) vers la fantaisie (un peu folle), puis de la fantaisie (pleine d’espoir, même si elle reste un peu folle) vers un réel qu’on voudrait voir appliquer ici et ailleurs. Les documents d’archives qui parsèment l’histoire de Viviana et les utopies, les efforts de ces femmes à côté de l’inaction des hommes, tout donne à penser et à sourire, amicalement. Quand on sait que Gioconda Belli s’est directement inspirée d’un groupe auquel elle a participé dans les années 1970, elle qui a participé au gouvernement du Nicaragua, La République des femmes  prend un relief considérable.

Forcément on n’est pas d’accord avec tout ce que met en œuvre le gouvernement des femmes, certains excès légèrement farfelus ou carrément discutables, comme l’utilisation du « crédit carbone » ou l’interdiction absolue de tout homme dans les sphères du pouvoir, mais la bonne humeur générale, l’optimisme rayonnant prennent le dessus. Un optimisme tout de même nuancé par l’attentat dont est victime la Présidente au premier chapitre, ce qui plonge tout le roman dans une ambiance assez troublante : le message envoyé par Gioconda Belli est bien double : oui tout cela est possible, mais rien n’est gagné d’avance.

Une république des femmes ! On sait bien qu’on n’y est pas encore, mais si elle ressemblait à celle du roman de Gioconda Belli, on aimerait tenter l’expérience, c’est un homme qui vous le dit !

La République des femmes, traduit de l’espagnol (Nicaragua) par Claudie Toutains, éd. Yovana, 254 p., 20 €.

Gioconda Belli en espagnol : El país de las mujeres, ed. seix Barral.

Gioconda Belli en français : Le pays que j’ai dans la peau. Mémoires d’amour et de guerre, éd. Bibliophane Éditions.

MOTS CLES : AMERIQUE CENTRALE / NICARAGUA / SOCIETE / HUMOUR / POLITIQUE / FEMINISME / EDITIONS YOVANA.

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